Un constat : l’industrie du photovoltaïque est dominée par la Chine, la Corée du Sud et Taïwan
Selon le classement publié par Tecsol en 2018, on trouve neuf industriels chinois et un sud‐coréen dans le top dix des plus gros fabricants mondiaux de modules photovoltaïques. Pour y voir de plus près il est nécessaire de distinguer les différentes étapes d’industrialisation de la filière Silicium qui représente l’essentiel du marché.
En amont se place la fabrication de lingots de silicium pur de qualité photovoltaïque (taux de pureté de 99,9993 %), une qualité moindre que celle requise pour l’électronique mais très gourmande en énergie. Le français Photowatt (groupe EDF EnR, Isère) pionnier historique de l’industrie photovoltaïque en France est l’un des rares fabricants de lingots et de wafers en Europe. Photowatt se positionne aujourd’hui sur le marché mondial avec une nouvelle technologie à bas carbone. Photowatt s’appuie pour cela sur la technologie Monolike développée par l’INES et l’entreprise grenobloise ECM spécialiste mondial des fours de cristallisation.
Puis l’on trouve la fabrication de plaquettes de Silicium dominée par la Chine avec 95% du marché mondial et la fabrication des cellules photovoltaïques dans un marché mondial partagé entre les industriels Chinois (68%) et Coréens (31%).
Côté modules et panneaux photovoltaïques la répartition des productions reflète d’avantage les marchés régionaux. Ainsi la production industrielle chinoise de modules photovoltaïques est d’avantage en rapport avec son marché intérieur qui représente 45% du marché mondial. L’Europe couvre 28% de ces besoins de panneaux photovoltaïques avec quelques industriels de taille européenne parmi lesquels on trouve :
- SolarWatt en Allemagne
- Conergie en Allemagne
- Euremer en Espagne
- Aleo Sunrise en Allemagne
- Recom en Italie
- AE Solar en Allemagne
- AEG en Allemagne
- AXITEC en Allemagne…
En France, on compte moins d’une dizaine d’industriels fabricant des panneaux photovoltaïques dans un marché est très fragmenté :
En France, on compte moins d’une dizaine d’industriels fabricant des panneaux photovoltaïques dans un marché est très fragmenté
- Photowatt conçoit aussi des cellules et des modules depuis 40 ans avec une capacité de production annuelle de 50 MWc;
- REDEN Industries (groupe REDEN, Roquefort) a une capacité de production annuelle de 65 MWc. Il a développé les modules bi-faciaux, afin d’optimiser la production des centrales photovoltaïques et se positionne sur des solutions clé en main ( fermes au sol, installations agrivoltaïques, grandes toitures)
- Voltec-Solar (groupe STRUB, Alsace) avec ses panneaux éco-conçus, est plutôt centré sur la fabrication de panneaux PV pour les grandes centrales au sol et des ombrières;
- Systovi (groupe CETIH, Pays de la Loire) se concentre sur le marché de la maison individuelle avec des services de pointe pour l’autoconsommation comme STOCK-O qui stocke l’énergie PV dans les ballons d’eau chaude sanitaire et SMART-R associant l’équipement PV à la ventilation mécanique et la domotique.
- DualSun (Ain) propose pour les maisons individuelles des panneaux hybrides permettant aussi le préchauffage de l’eau chaude sanitaire en sous face du panneau;
- Amysolar à Limoges propose des panneaux solaires en silicium cristallin et amorphe, des solutions pour toitures, abris urbains, vérandas, fermes au sol et installations agrivoltaïques;
- Jade-Technologie à Champlan dans l’Essonne propose des petits panneaux mono et polycristallins (23 W) ou en silicium amorphe (1 à 16 W) pour l’alimentation d’équipements électroniques en sites isolés;
- VMH Energies, qui avait racheté la coopérative SCNAsolar, fabrique notamment les tuiles photovoltaïques Sunstyle pour Sunstyle International;
- S’Tile à Poitiers, développe des panneaux en silicium monocristallins, avec une technologie permettant d’ajuster leurs dimensions, puissances, tensions sur mesure, en fonction des besoins des clients, y compris des panneaux non-plats,unpow courbes ou ondulés.
L’industrie photovoltaïque en France est actuellement redynamisée par le projet Belenos qui va prochainement combiner les productions de Systovi et de Voltec Solar pour une capacité de production de 1GW par an. A noter aussi que certains fabricants ont des usines en France :
- Recom Italia qui a acheté le français Sillia en 2017 et développé son usine de Lannion
- Sunpower (US avec Total comme actionnaire majoritaire) possède deux sites de production en France : De Vernejoul en Moselle et Toulouse.
Pourquoi privilégier une provenance locale ?
La fabrication locale se justifie essentiellement par des raisons de développement économique à travers la création d’emploi direct et indirect (sous-traitance et injection de pouvoir d’achat). Elle se justifie aussi par des considérations environnementales (traitement local des impacts pour ne pas les exporter, limitation des impacts de transports).
Pour le photovoltaïque la dimension indépendance énergétique s’ajoute aux intérets économiques alors que l’impact des transports est négligeable par rapport à celui de la fabrication des cellules (moins de 1% de contenu énergétique d’un panneau). Par contre le contenu en carbone de l’électricité du lieu de fabrication des cellules joue un rôle important dans l’impact global.
Pour favoriser le local il convient se pencher sur la chaîne de valeur ajoutée que l’on peux assimiler à la répartition des coûts. Selon un rapport de la CRE intitulé “Coûts et rentabilités du grand photovoltaïque en métropole continentale-février 2019” les modules PV représentent 1/3 des coûts d’investissement pour une installation de 100 à 120 kWc sur un bâtiment (moyenne sur 121 installations).
Ainsi le recours au local pour les équipements électriques, les travaux d’installation et de raccordement ainsi que d’ingénierie permettent de garantir l’essentiel de la démarche locale.
Si de plus les panneaux sont assemblés en France, la part du local peut atteindre les ¾ de la valeur de l’investissement malgré un recours à des cellules fabriquées en Asie.
Jean-Alain Bouchet
expert énergie et bâtiment